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Les abeilles

Et je sais qu’il y en a qui disent : ils sont morts pour peu de chose. Un simple renseignement (pas toujours très précis) ne valait pas ça, ni un tract, ni même un journal clandestin (parfois assez mal composé). A ceux-là il faut répondre :
« C’est qu’ils étaient du côté de la vie. C’est qu’ils aimaient des choses aussi insignifiantes qu’une chanson, un claquement des doigts, un sourire. Tu peux serrer dans ta main une abeille jusqu’à ce qu’elle étouffe. Elle n’étouffera pas sans t’avoir piqué. C’est peu de chose, dis-tu. Oui, c’est peu de chose. Mais si elle ne te piquait pas, il y a longtemps qu’il n’y aurait plus d’abeilles. »
 
Jean Paulhan
« L’abeille », texte signé "Juste", paru dans Les cahiers de Libération en février 1944

Les rendez-vous

Vendredi 12 mai à 18 h, aux Archives départementales à Charleville-Mézières, dans le cadre des vendredis de l'histoire de la Société d'Histoire des Ardennes, conférence de Grégory Kaczmarek : "La grande grève revinoise de 1907 : cinq mois de combats ouvriers".

Vendredi 16 juin à 18 h, aux Archives départementales à Charleville-Mézières, dans le cadre des vendredis de l'histoire de la Société d'Histoire des Ardennes, conférence de Philippe Lecler : "Pol Renard, un héros de la Résistance".

 

 

1 octobre 2011 6 01 /10 /octobre /2011 08:01

 

 

 

 

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La Résistance ardennaise et de Lorraine belge, de l’intégration au réseau Prosper à la chute du maquis du Banel (1942-1944)

 

Fruit de nombreuses années de recherches dans les fonds familiaux, locaux et régionaux, mais aussi aux National Archives de Kew (Grande-Bretagne), aux Archives nationales à Paris, au Service historique de la Défense à Vincennes, au Centre d'études et de documentation guerre et société contemporaine (CEGES) à Bruxelles, au ministère de la Défense belge, au service des archives de la Sûreté de l'État belge, à celui des ex-juridictions militaires de Belgique, ainsi qu’au National Archives and Records Administration de Washington (USA), Face à la Gestapo révèle les dessous de la traque menée par les services secrets allemands pour infiltrer, contrôler, et anéantir les organisations de résistance dans les Ardennes et en Lorraine belge entre 1942 et 1944.

 

Un ouvrage de plus de 250 pages, grand format (20 x 24), plus de 100 photos et documents pour la plupart inédits.  

Sortie prévue en librairie le 2 novembre.

 

 

Table des matières

 

Première partie : Le réseau Prosper/Physician  dans les Ardennes (juin 1942-juin 1943)

 

1 – La French section

Aux origines du réseau Prosper - Armel Guerne, poète et résistant - La Gestapo décapite Prosper - L’affaire de la French section

 

2 - « Ardenne, Tiens Ferme ! » (juillet 1942-septembre 1943)

Muno, épicentre du réseau Prosper dans les Ardennes - Un épisode oublié de la Résistance ardennaise ? - Les parachutages à Origny - Les parachutages au Monty - Arrestations à Origny, à Carignan et à Muno - Prison et déportation

 

3 - Les évadés du transport du 17 janvier 1944

« La nuit étant presque complète… » (L. Maurice Lelabour) - « Soudain les mitrailleuses crépitèrent… » (Armel Guerne) - « On commence à sauter d’autres wagons… » (André Guerre)

Bilan des évasions

 

Epilogue

Armel Guerne, de la prison anglaise… À la Cour de justice - Bilan


Deuxième partie : Les conséquences désastreuses du démantèlement du réseau Prosper (juin 1943 – juin 1944) 

 

1 –Le réseau ARCHDEACON et les contre-parachutages

Le Dr Goetz, maître du Funkspiel-Préparation de l’opération Archdeacon - La Gestapo française de l’avenue Foch - L’opération Archdeacon - L’homme qui est mort deux fois – L’affaire dite des « parachutistes alliés » - La Gestapo infiltre la résistance ardennaise - Mort d’Émile Fontaine - La répression dans les Ardennes à Sedan et à Charleville… Et dans la région d’Attigny - Bilan des arrestations - Et les parachutistes alliés ?

 

2 - Vie et mort du réseau Possum (juillet 1943-janvier 1944)

Itinéraire d’un patriote - La mission du commandant d’Edgard Potier - Mise en place du réseau Possum et premiers succès - Les derniers jours d’un réseau - Autopsie d’un désastre -

Après la chute

 

3 -  La chute du maquis du Banel (avril-juin 1944)

Adelin Husson, journaliste de combat - Florenville et le rendez-vous de Laiche - Le groupe de Chiny et le service Socrate - L’abbé Roland Fontaine et quelques jeunes du maquis - Les aviateurs du Banel

L’abbaye Notre Dame d’Orval et la Résistance - Le corps franc du Banel – Le SBS et la ligne G-H : Lausanne, nid d’espions - La chute du maquis du Banel - Le piège - Les suites de l’affaire du Banel

 

Sources et bibliographie

Remerciements

 

   

 

Présentation


S’il est un aspect méconnu de la Résistance dans les Ardennes françaises et sur la frontière belge, c’est bien celui de l’activité du réseau britannique SOE-Buckmaster  Prosper/Physician dans cette région.


Implanté en Belgique, dans le village de Muno, à un jet de pierre de la frontière française, le réseau Prosper s’organisa avec la coopération de résistants français, en la personne notamment de Georges Lefèvre. Une première réunion franco-belge à laquelle participèrent les chefs de la Résistance ardennaise, Paul Royaux et André Point, sur l’initiative d’un agent du SOE aboutit à la création de la branche ardennaise de PHYSICIAN, dirigée par le poète Armel Guerne (dit « Gaspard »), et aux parachutages du printemps 1943. C’est alors que la Résistance ardennaise s’intégrait au réseau Prosper qu’un journaliste belge fondait un réseau de renseignements dont le cœur se trouvait, une fois encore, sur la frontière. Le maquis du Banel fut le centre de cette toile tissée patiemment par son chef, le Belge Adelin Husson.


lefevre georges

Portrait de Georges Lefèvre

(Doc. A.Biazot)


L’objet de cette recherche n’est pas le réseau Prosper/Physician : son historique et les questions posées par sa chute en dépasseraient très largement le cadre. Il est plutôt de circonscrire l’action de ses agents des deux côtés de la frontière, de tenter d’expliciter les raisons et les modalités de son démantèlement, de préciser les conséquences qu’il eut dans la région (affaire des contre-parachutages et affaire dite « des parachutistes alliés »), de comprendre la genèse et l’échec du réseau Possum, ainsi que de définir l’action du maquis du Banel de sa création à son démantèlement par les troupes allemandes.


Cet événement, ou plutôt ces événements, tant ils sont liés entre eux, tant les imbrications entre les uns et les autres sont fortes, avec des personnalités récurrentes que l’on retrouve ici et là, forment une trame unique dans l’histoire de la Résistance ardennaise et belge. Ils restent pourtant totalement inconnus de l’historiographie de la Résistance ardennaise, à l’exception de quelques mentions faites des parachutages, parfois même mis en doute, du printemps 1943 (Voir J. Vadon, « Les parachutages dans la Résistance ardennaise (Mai 43-Août 44) », Revue Historique Ardennaise, T. XVII ). De même, les archives des FFI conservées aux Archives départementales des Ardennes ne contiennent aucun dossier sur cet engagement de l’OCM auprès de Prosper, ou sur l’historique du maquis du Banel. Ignorée du côté français, l’appartenance au réseau Prosper des groupes de résistance franco-belge de la région Muno-Carignan fut mise en lumière par un Belge d’Arlon, Alfred Dubru, qui édita en 1987, à compte d’auteur, un mémoire consacré à la Résistance dans la région de Florenville. Ce remarquable travail, effectué à partir d’archives conservées en Belgique et de recueils de témoignages, fait la synthèse des grands événements qui marquèrent la Résistance en ce coin d’Ardenne (naissance et chute de Prosper, mise en place du réseau et démantèlement de Possum, rôle et action du maquis du Banel), même s’il ne cite pas, ou peu, l’action d’Armel Guerne, Gaspard, et son rôle dans la chute du réseau en cette région.

 

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Portrait d'Armel Guerne dans les années 40

(Doc.  Amis d'Armel Guerne)


C’est le livre de John Vader sur le réseau Prosper/PHYSICIAN et l’activité de résistant d’Armel Guerne en son sein, publié en 2002, qui lève un coin du voile sur l’organisation générale de Prosper et le rôle de Guerne, organisateur du réseau dans les Ardennes et dans l’Aisne. Basé sur le témoignage de ce dernier, l’ouvrage tente de résoudre finalement la question de la responsabilité de Guerne dans la disparition de Prosper et dans l’arrestation de ses agents. Quant au maquis du Banel, il est inutile de préciser que seules les mémoires résistantes françaises et, surtout,  belges conservent et entretiennent son souvenir, et que malgré l’énorme activité qu’il a déployé en matière de recherche et de transmission du renseignement, il ne fut, du côté français, que tardivement reconnu comme une unité combattante…


Outre la consultation des ouvrages cités ci-dessus (et d’autres dont on trouvera la liste dans la bibliographie), ce livre a été composé en grande partie grâce aux recherches menées par nous-mêmes, outre dans les fonds familiaux, locaux et régionaux, mais aussi aux National Archives de Kew (Grande-Bretagne), aux Archives nationales à Paris, au Service historique de la Défense à Vincennes, au Centre d'études et de documentation guerre et société contemporaine (CEGES) à Bruxelles, au ministère de la Défense belge, au service des archives de la Sûreté de l'État belge, à celui des ex-juridictions militaires de Belgique, ainsi qu’au National Archives and Records Administration (NARA) de Washington (U.S.A.).


Dans ce livre, chaque chapitre porte de constants rappels aux chapitres précédents tant les événements et les situations  initiales ne se comprennent qu’à la lumière de faits antérieurs (ce qui en histoire, nous en convenons, relève de la tautologie), tant les personnages, acteurs ou témoins privilégiés, se retrouvent d’un événement à l’autre et tant les répercussions de leurs actions sur les événements en cours ne sont significatives qu’à la lumière de l’événement précédent. C’est donc sous la forme d’un récit suivi que se présente cette étude. En voici les principales articulations.


FAS photo hatPortrait de Francis suttill

(Doc. F.J. Suttill)


Le Major britannique  Francis Suttill fut parachuté en France occupée en octobre 1942 afin d’y implanter un grand réseau relevant du Special Operations Executive  (SOE), le réseau Prosper/Physician. Son objectif était de développer la lutte subversive contre les Allemands sur le territoire français en favorisant notamment la création de groupes de résistance que le War Office de Londres pourvoyait en armes grâce aux parachutages. Nous verrons que le réseau prit une extension géographique importante, et qu’il fut implanté dans les Ardennes sous la responsabilité du poète et écrivain Armel Guerne, alias Gaspard. L’arrestation par les Allemands en juin 1943 de deux opérateurs radio canadiens, Bertrand et Valentin, qui avaient été parachutés dans le but de prendre en charge le secteur ardennais du circuit GASPARD III, marquait le prélude à la fin du réseau Prosper. Francis Suttill fut appréhendé à Paris par la Gestapo le 24 juin 1943. Conduit avec ses adjoints dans les bureaux de la Gestapo, interrogé, martyrisé, il ne put s’opposer à la prise des dépôts d’armes au terme d’un « arrangement » pris par certains avec les Allemands. C’est dans cet esprit qu’Armel Guerne, arrêté en juillet 1943, livra les siens.

 

PHYSICIAN avait été implanté tout d’abord dans un village belge frontalier avec la France, Muno, après qu’un résistant du lieu eut été contacté par un agent  du réseau Carte sur les cendres duquel il se constitua. En juillet 1942, l’état-major de la Résistance ardennaise avait été convié à Herbeumont, en Belgique, à une réunion au cours de laquelle le représentant de Carte avait fait valoir les avantages de son réseau. Les contacts frontaliers étaient fréquents entre ces groupes locaux de résistance dont la principale activité, en ce début de 1942, était l’aide aux prisonniers de guerre évadés. Les groupes ainsi créés avaient été agréés par Londres par un message personnel fameux qui était passé sur les ondes de la BBC : « Ardenne, tiens ferme ! ». Après la disparition de Carte au début de 1943, les agents de ce réseau étaient passés à Prosper/PHYSICIAN et les deux jeunes belges, Walter Marly et Pierre Geelen, à qui avait été confiée, sous la responsabilité d’Armel Guerne, la mission d’organiser les opérations aériennes dans la région de Muno et dans celle d’Origny-en-Thiérache permirent aux groupes locaux de résistance de constituer des dépôts d’armes après les parachutages des mois d’avril et mai 1943.

Après la chute du réseau Prosper, Armel Guerne livra ses dépôts à la Gestapo. Après la prise de celui d’Origny en août 1943, les policiers allemands contraignirent Guerne à les accompagner à Carignan et à Muno, où ils procédèrent à l’arrestation des agents ardennais de Prosper et à l’enlèvement des stocks d’armes constitués. Pour finir, nous nous attarderons sur le sort réservé aux agents du réseau Prosper/PHYSICIAN après la vague d’arrestations en son sein à l’été de 1943. La plupart de ceux-ci furent internés au camp de Compiègne-Royallieu avant d’être déportés vers le camp de concentration de Buchenwald par le transport du 17 janvier 1944. Nous verrons dans le détail comment Armel Guerne parvint à s’échapper de son wagon ce jour-là, en même temps que d’autres déportés, lorsque le convoi arriva dans les Ardennes, après son passage en gare d’Amagne-Lucquy. Ce point est particulièrement important puisque Guerne fut soupçonné dès son retour à Londres d’avoir trahi le réseau, les Allemands ayant pu favoriser sa fuite pour prix de son forfait supposé. Après avoir mené enquête sur les conditions de cette évasion sur le terrain même où elle eut lieu, après avoir recoupé les propos de Guerne avec ceux d’autres évadés dont nous avons retrouvé les témoignages, nous pouvons, s’il en était besoin, confirmer en tous points les relations que Guerne fit de son évasion.

 

Le démantèlement du réseau Prosper/PHYSICIAN eut des conséquences désastreuses pour l’ensemble de la Résistance. Dans la région, les services de contre-espionnage de la Gestapo entamèrent un audacieux Funkspiel qui leur permit d’entrer en contact avec Londres, grâce au matériel de radio pris sur les deux opérateurs radio Bertrand et Valentin qui devaient travailler sur le secteur ardennais de PHYSICIAN. Par l’intermédiaire de leur faux réseau Archdeacon basé dans l’Aisne, ils se firent parachuter pendant près d’une année armes, argent, et même agents du SOE qui étaient immédiatement arrêtés dès leur arrivée sur le sol de France. L’opération Archdeacon permit en outre à la Gestapo d’infiltrer une filière d’évacuation d’aviateurs alliés dans les Ardennes et de décimer au printemps de 1944 la Résistance dans le département.


Pendant ce temps, à la frontière, était implanté le réseau Possum dirigé par commandant belge d’aviation Edgard Potier après qu’il eut été parachuté dans l’Ardenne belge. Chargé de créer une ligne d’évacuation par air des aviateurs alliés, le commandant Potier trouva de nombreuses complicités dans la région de Muno jusqu’à ce que le désastre de Prosper vienne bouleverser sa mission.  Édifié sur les décombres du réseau Prosper, Possum exécuta sa mission dans des conditions périlleuses, jusqu’à son inéluctable démantèlement par la Gestapo… Arrêté à Reims le 29 décembre 1943, après dénonciation, Edgard Potier se donna la mort quelques jours plus tard sans avoir parlé.


potier capitaineEdgard Potier photographié en Angleterre

(Doc. F. Greyer)

 

L’ouvrage consacre enfin une large partie au maquis du Banel, dont la plus grande originalité ne fut pas seulement d’avoir été le premier maquis ardennais ou le seul à personnel tant français que belge, mais d’avoir été une véritable organisation de résistance, avec ses services de diffusion de presse clandestine, d’aide aux illégaux et aux aviateurs alliés, ses corps francs voués au sabotage, et surtout son service de renseignements en liaison régulière avec la Suisse… Nous verrons ainsi comment et pourquoi ce maquis fut fondé dès 1942 par le journaliste belge Adelin Husson sur le domaine boisé du Banel, à cheval sur la frontière franco-belge ; comment son service de renseignements étendit ses ramifications tant en France qu’en Belgique ; comment furent établis les contacts avec les services de la Sûreté belge en Suisse ; et comment et pourquoi cette organisation, apparemment si solide, tomba si rapidement lorsque le 18 juin 1944 les troupes allemandes investirent son aire et massacrèrent les maquisards présents…

 

Churchill Gazette

 

La Churchill Gazette, Journal clandestin fondé au début de 1941 par le chef du maquis du Banel, Adelin Husson


Avec la disparition du maquis du Banel, la boucle était bouclée… Le Banel avait été le premier bénéficiaire des parachutages d’armes obtenus par le réseau Prosper/PHYSICIAN en Ardenne. La longue suite de désastres pour la Résistance après que Prosper eut disparu, et l’ampleur de la répression allemande au sein des groupements et des réseaux tout au long des années 1943 et 1944, auraient pu laisser croire à la victoire de la Gestapo et des services d’espionnage et de contre-espionnage allemands. On sait qu’il n’en fut rien. Avec le débarquement réussi des Alliés sur les côtes normandes, le rapport des forces avait changé et la lutte changeait de nature : pour la Résistance, c’en était fini du temps de l’organisation et de la guerre clandestine. Les combats pour la libération débutaient.

 

Image1Parmi les fossoyeurs du maquis du Banel, ces officiers du Sipo-SD de Liège-Arlon (Doc. A. Biazot)

 

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