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Premier mai 1945 : retour en France
Tout commence par une désinfection contre les parasites : poux, punaises, puces..., désinfection effectuée par les Américains. Nous nous présentons un par un, col de chemise et braguette déboutonnées devant celui qui est chargé d'effectuer ce travail. Un coup de soufflet d'unepoudre blanche et nous voilà parés pour monter dans les camions de l'armée américaine. Inutile de décrire notre joie.
Premier arrêt à Münster où nous passons la nuit. Le lendemain, nouvelle désinfection et même rituel. Nous sommes dirigés ensuite vers 1a gare où nous sommes pris en charge par les militaires de la Croix Rouge Française. Ils nous accueillent avec beaucoup de chaleur tout en s'excusant de n'avoir trouvé comme moyen de transport que des wagons tombereau à ciel ouvert. Mais qu'importe ! L'essentiel désormais est de revoir la France, notre pays, nos familles, nos amis. Après deux années de galère, cela reste notre priorité.
Nous sommes assis à même le plancher du wagon, planqués dans des couvertures, ballottés de droite à gauche à chaque aiguillage.
Nous ne pouvons pas dire que ce voyage est un voyage de plaisance !
Nous passons le Rhin à Essen. Sur un pont de bateaux, un petit incident survient : le wagon de queue saute des rails. Les hommes sont transférés dans d'autres wagons.
Nous passons les Pays-Bas, la Belgique (Liège où nous sommes très bien accueillis).
Le lendemain, 3 mai, nous changeons de wagons pour des wagons à bestiaux qui sont couverts. Cela va déjà mieux. Nous roulons à très faible vitesse car nous sommes souvent parqués sur des voies de garage afin de laisser passer les trains militaires.
Enfin, voilà la France ! Après avoir passé plusieurs mois en terre étrangère, cela fait chaud au cœur ! Mais notre bonheur est quelque peu attristé par le souvenir de nos camarades qui sont restés là-bas... morts.
Premier arrêt : Saint-Quentin. Nous sommes accueillis par la Croix Rouge et avons droit à une distribution de sandwichs et un quart de rouge. Arrivée à Paris le 5 mai, gare du Nord. A la descente du train, nous avons droit à la musique militaire. Nous sommes emmenés par autobus au centre d'Orsay pour une visite médicale. Carte de rapatrié et carte d'identité nous sont délivrées. Tout ce que nous avons sur le dos comme vêtements est passé dans des autoclaves pour désinfection. Des scouts portent nos sacs. Nous sommes ensuite dirigés vers le Gaumont Palace. Un télégramme est envoyé à nos familles pour prévenir de notre retour prochain.
Le lendemain, c'est l'adieu aux copains. On s'embrasse, c'est la grande joie à l'idée de rentrer chez nous. Je suis conduit en voiture à la gare de l'Est. On me cherche une place assise dans le train et c'est le départ pour Sedan.
Raymond m'attend à la gare. Je suis conduit à B... en voiture. C'est difficile de réaliser ! Difficile de se retrouver !
La première nuit passée à la maison, il m'est impossible de garder le lit. Je me retrouve au petit matin couché sur le plancher de la chambre. II me faudra du temps pour refaire surface.
Tous les trois mois, je passe une visite médicale au dispensaire-hôpital de Sedan.
Que de changements ! Il me faut désormais reprendre mes habitudes, mon travail.
Mais jamais je ne pourrai oublier !