Si l’on considère certaines sources, Il semble que les hommes du maquis Prisme, dit "Maquis des Ardennes", aient été dotés d’un insigne récupéré sous l’Occupation dans un dépôt de l'armée.
Les maquisards le portèrent-ils sur leur béret ? Le musée virtuel de la Résistance en présente un exemplaire, pour lequel j’ai rédigé la notice qui suit.
Peu de documents corroborent cette assertion.
Deux photographies prises au maquis lors d’une prise d’arme le jour du 14 juillet 1944 montrent des hommes vêtus de vestes imperméables sans manches portées sur un pull-over et tous porteurs d’un béret avec écusson circulaire. Selon Georgette Fontaine, il s’agit de gendarmes qui ont déserté leur casernement et ont rejoint avec armes et bagages le commandant Prisme au début du mois de juillet. Dans l’ouvrage de J.P. Cordier, Combat en Ardenne, l’insigne appartenant à l’un de ces gendarmes est dessiné (mais l’auteur n’en indique pas la provenance). Les gendarmes formant l’encadrement du maquis (ils ont l’expérience du commandement et du maniement des armes), on peut supposer qu’ils furent les seuls à porter cet insigne qu’ils amenèrent eux-mêmes ?
Par ailleurs, au titre des sources, on peut citer ce témoignage d’un aviateur américain qui fut un temps hébergé au maquis : « Cette organisation s’appelait Maquis des Ardennes. Ses membres portaient un insigne métallique circulaire sur leurs bérets. »
Doc : Musée de la Résistance en ligne (AERI)
Cet insigne est marqué d’une tête de sanglier avec en arrière plan une vue sur une falaise au pied de laquelle est une tour.
Dans la symbolique militaire moderne, le sanglier figure sur de nombreux insignes, notamment sur ceux des régiments d’infanterie, de blindés, ou encore, avant la guerre de 1939-1945, de forteresse, dont ceux de la fameuse ligne Maginot.
Le paysage est une vue du fort de Charlemont qui domine, du haut de sa falaise, la Meuse et la ville de Givet. Ce fort a été construit à partir de 1550 par Charles-Quint, il est revenu à la France sous Louis XIV, en 1680, puis il fut agrandi par Vauban. Au pied de la falaise figurent la Meuse, le pont de la ville, les quais avec la tour Victoire construite au XVe siècle. L’ensemble a donc pour vocation de représenter la puissance du système défensif en un secteur qui est aux avant-postes du territoire, la « pointe » de Givet étant enclavée en Belgique.
Si son iconographie renvoie donc au 148e régiment d’infanterie qui tint ses quartiers à Givet de 1899 à 1914, il n’en reste pas moins que l’insigne fut celui du Secteur défensif des Ardennes à la veille de la Deuxième Guerre mondiale.
L’origine de la devise est inconnue. Sur l’insigne original, le mot "Ardennes" est au pluriel. Il désigne donc le département. Lorsque la Résistance ardennaise s’empara de cette devise pour la faire sienne, elle modifia son sens en élargissant la notion de territoire national à la réalité transfrontalière de son action, l’Ardenne désignant en effet une région naturelle située dans un ensemble franco-belge, voire franco-belgo-luxembourgeois.
Chronologiquement, on voit donc la devise apparaître :
- En juillet 1942, lorsque se réunissent en Belgique, à Herbeumont, des responsables de groupements de résistance français et belges. L’animateur se lance dans « un étourdissant exposé des possibilités et des moyens pouvant être mis à notre disposition par les organismes anglais de Londres [le SOE]. » Sceptiques, les présents demandent « un message de confiance avant de suivre aveuglément. Ce message, tous les Ardennais, écoutant régulièrement la BBC s’en souviendront : “Ardenne tiens ferme ! Courage les amis, à bientôt”. » Deux témoins relatèrent cet épisode en écrivant « Ardenne » plutôt qu’ « Ardennes ».
- En août 1944, le journal de la Résistance, composé par le chef de centre de Floing, Marcel Léonard, prend le titre d’« Ardenne, tiens ferme ».
- Aujourd’hui, ce nom est celui du bulletin des membres de l’Union ardennaise des FFI (UAFFI). On note que pour cette association, si le sanglier de l’insigne original est demeuré, le paysage en arrière-plan a été remplacé par une croix de Lorraine.
La devise « Ardennes, tiens ferme » (avec ou sans le point d’exclamation) a été reprise par le 3e régiment du génie en garnison à Mézières.
Médaille éditée par l'UAFFI pour les commémorations du cinquantenaire
de la libération des Ardennes (doc : P. Lecler)