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Les abeilles

Et je sais qu’il y en a qui disent : ils sont morts pour peu de chose. Un simple renseignement (pas toujours très précis) ne valait pas ça, ni un tract, ni même un journal clandestin (parfois assez mal composé). A ceux-là il faut répondre :
« C’est qu’ils étaient du côté de la vie. C’est qu’ils aimaient des choses aussi insignifiantes qu’une chanson, un claquement des doigts, un sourire. Tu peux serrer dans ta main une abeille jusqu’à ce qu’elle étouffe. Elle n’étouffera pas sans t’avoir piqué. C’est peu de chose, dis-tu. Oui, c’est peu de chose. Mais si elle ne te piquait pas, il y a longtemps qu’il n’y aurait plus d’abeilles. »
 
Jean Paulhan
« L’abeille », texte signé "Juste", paru dans Les cahiers de Libération en février 1944

Les rendez-vous

Vendredi 12 mai à 18 h, aux Archives départementales à Charleville-Mézières, dans le cadre des vendredis de l'histoire de la Société d'Histoire des Ardennes, conférence de Grégory Kaczmarek : "La grande grève revinoise de 1907 : cinq mois de combats ouvriers".

Vendredi 16 juin à 18 h, aux Archives départementales à Charleville-Mézières, dans le cadre des vendredis de l'histoire de la Société d'Histoire des Ardennes, conférence de Philippe Lecler : "Pol Renard, un héros de la Résistance".

 

 

10 juin 2013 1 10 /06 /juin /2013 15:54

 

  Liaisons dangereuses

 

 

J.M. Berlière, F. Le Goarant de Tromelin,

Liaisons dangereuses -  miliciens, truands, résistant - Paris 1944, Perrin, Paris, 2013.

 

 

Le 7 juillet 1944, l’ancien ministre de l’intérieur Georges Mandel, après avoir été ramené en France par les autorités allemandes, est transféré de Paris à Vichy sous la garde de  la Milice française. Au cours d’une halte en forêt de Fontainebleau, le milicien Mansuy tire un revolver de sa poche et abat froidement Mandel de plusieurs balles. Au cours du procès qui se tiendra à la Libération, il apparaîtra que s’ils furent nombreux à avoir souhaité cette mort, personne n’assumera l’ordre qui fut donné de tuer Mandel. Qui a donné l’ordre d’exécution ?

La personnalité de Mansuy est au cœur de cette enquête. Après une jeunesse difficile, il est plusieurs fois condamné pour des petits délits : escroc, proxénète, la période de l’Occupation lui présente des opportunités dont il va tirer avantage. Ce petit truand se lance dans divers trafics et opérations de marché noir, se rapproche des groupuscules collaborationnistes et de la police allemande (la Sipo-SD, dite « Gestapo ») pour laquelle il va travailler, puis intègre en 1944 la Milice française. Qui a armé la main de Mansuy ? Ce dernier est abattu à son tour le 26 août 1944 à l’hôtel de ville de Paris, lors de la libération de la ville. Il s’y est présenté aux nouvelles autorités comme « membre du 2e bureau FFI », « engagé dans les FFC », encarté au BCRA… Son corps disparaît rapidement, ainsi que les papiers et documents qu’il portait avec lui. Qui a tué Mansuy ? Et pourquoi ?

 

L’assassinat de Mandel a été considéré par les contemporains et est toujours présenté par les historiens comme un acte de représailles de la Milice à la suite du meurtre du ministre-milicien Philippe Henriot le 28 juin. Cette mort – elle a tout autant été désirée par la Résistance que celle de Mandel l’a été par les tenants de la collaboration – est entouré d’un mystère tout aussi épais que la précédente. Parmi les résistants qui composaient le commando chargé de l’exécution de Philippe Henriot, la « bande Morlot », on retrouve des comparses de Mansuy, truands, souteneurs, escrocs, faux policiers et maîtres-chanteurs…

 

henriot

 

Philippe Henriot

 

Durant l’été de 1944, « on voit ainsi se dresser le décor peu exploré d’une Libération dans laquelle des miliciens porteurs de brassards FFI surtout préoccupés par les profits et les affaires que les ambigüités de la période facilitent […] Nos ex-miliciens ou néo-résistants, vrais truands et trafiquants de marché noir, qui ont noué et entretenus des rapports qui transgressent les frontières très poreuses , vont participer à la semaine héroïque et à la libération de Paris “par lui-même” ».

L’ouvrage, par un dépouillement méthodique et une étude exhaustive de documents d’archives policières et judiciaires jusqu’alors très peu ou jamais exploités explore les zones grises de la Libération et parvient à démontrer «  les liens et les collusions, existant entre truands, souteneurs, trafiquants du marché noir naviguant entre résistance et collaboration  ».

 

On rappellera que Jean-Marc Berlière, professeur émérite d’histoire contemporaine à l’université de Bourgogne, est un spécialiste de la France sous l’Occupation et de l’histoire de la police. Parmi ses principales publications : Liquider les traîtres. La face cachée du PCF clandestin, 1941-1943 (avec Frank Liaigre), Le sang des communistes. Les bataillons de la jeunesse dans la lutte armée, automne 1941 (avec Frank Liaigre), et, dernièrement Ainsi finissent les salauds. Séquestrations et exécutions clandestines dans Paris libéré (avec Franck Liaigre).

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